lundi 6 mai 2019

Un militant à Bujumbura : ''Si moi et Pierre Nkurunziza avons perdu des amis que personne ne voulait perdre, je n'ai pas peur.''

Très actif dès le début des manifestations contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza en avril 2015, M.D a assisté à la répression sanglante de la contestation. Tenté à plusieurs reprises de fuir le Burundi, l'habitant de Bujumbura a finalement décidé de rester dans le pays natal. Il est convaincu que Dieu peut le protéger et que la mort est naturelle. Il indique qu'il n'a pas peur de la mort parce que même le président Pierre Nkurunziza n'a pas pu protéger certains de ses amis contre la mort.


Monsieur M.D, vous avez combattu l'injustice avant et tout particulièrement après l'approbation de la candidature de Pierre Nkurunziza au troisième mandat. 

Vous arrive-t-il aujourd'hui de penser que vous avez perdu votre temps?

Je n'ai pas perdu mon temps parce que j'ai exprimé mon opinion et tout le monde m'a entendu. 
Même Pierre Nkurunziza m'a entendu mais malheureusement il a réagi par la force et a ordonné la répression violente qui a causé la mort de plusieurs personnes.

Je n'ai pas perdu mon temps parce que Pierre Nkurunziza est conscient que j'avais raison. Il n'est pas tranquille même s’il reste au pouvoir. Donc, mon implication a eu un effet sur Pierre Nkurunziza.

Vous étiez justement en première ligne dans les protestations contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza. Mais malgré cela vous êtes toujours au Burundi. 
Vous n'avez pas peur?

Je n'ai pas peur parce que tout le monde va mourir même celui qui tue les autres.
Je n'ai pas peur parce que j'ai échappé à la mort à deux reprises et j'ai compris que Dieu peut me protéger. Et si je meurs, ma mort ne sera pas une surprise ! 
Mes amis ont été tués devant moi et je ne pouvais pas les protéger.
Les amis de Nkurunziza ont été également tués et il n'a pas pu les protéger alors qu'ils avaient tous les moyens.
Si moi et Pierre Nkurunziza avons perdu des amis que personne ne voulait perdre, je n'ai pas peur. 
Je reste optimiste que la solution viendra bientôt. 


Vous vous souvenez encore d’amis que vous n’avez pas pu sauver il y a quatre ans. 
Qu'est-ce qui vous a, le plus, choqué?

Lors des manifestations contre le troisième mandat, j'ai été choqué en voyant des policiers tirer dans les maisons où il y avait des femmes et des enfants qui ne participaient même pas aux manifestations.

J'ai été particulièrement choqué par la mort de Théogène Niyondiko, un étudiant qui était manifestant à Musaga. Quelques jours avant son assassinat, il avait accordé une interview à Aljazeera. 
Théogène était moralisateur. Qu'il repose en paix!

J'ai été particulièrement choqué par la mort de Kabura Timothée, un militaire qui a été tué devant moi à la 9ème avenue à Nyakabiga devant l’hôtel Niwakal. C’était au mois de mai, je me dirigeais vers le campus Mutanga dans l’avant-midi. Tout à coup, moi et mes amis entendîmes des coups de feu derrière nous. Un policier qui était sur un pick-up venait de tirer sur Timothée. 
Quand je me suis retourné, j’ai vu Timothée tomber dans un caniveau. Nous venions juste de passer devant ce militaire et un étudiant qui s’appelle Vianney venait de discuter avec lui de passage.
Lorsque nous l’avons vu tomber, nous avons fait demi-tour et nous avons constaté qu’il était déjà mort.
Je ne pouvais pas imaginer qu'un militaire pouvait être tué par un policier. Ce jour-là, j'ai constaté que les forces de sécurité ne sont pas unies et c'est dangereux même aujourd’hui ou demain si un tel incident se reproduit.
Tantôt vous parliez de la solution, d’où viendra-t-elle selon vous?

La solution viendra des burundais et des partenaires du Burundi car le processus de paix implique différents acteurs.
Les burundais feront le premier pas et les autres partenaires s’appuieront sur l’environnement qui aura été créé par nous-mêmes.




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