Très actif dès le début des manifestations contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza en avril 2015, M.D a assisté à la répression sanglante de la contestation. Tenté à plusieurs reprises de fuir le Burundi, l'habitant de Bujumbura a finalement décidé de rester dans le pays natal. Il est convaincu que Dieu peut le protéger et que la mort est naturelle. Il indique qu'il n'a pas peur de la mort parce que même le président Pierre Nkurunziza n'a pas pu protéger certains de ses amis contre la mort.
Monsieur M.D, vous avez
combattu l'injustice avant et tout particulièrement après l'approbation de la
candidature de Pierre Nkurunziza au troisième mandat.
Vous arrive-t-il aujourd'hui
de penser que vous avez perdu votre temps?
Je n'ai pas perdu mon temps parce que j'ai exprimé mon
opinion et tout le monde m'a entendu.
Même Pierre Nkurunziza m'a entendu mais
malheureusement il a réagi par la force et a ordonné la répression violente qui
a causé la mort de plusieurs personnes.
Je n'ai pas perdu mon temps parce que Pierre Nkurunziza
est conscient que j'avais raison. Il n'est pas tranquille même s’il reste au
pouvoir. Donc, mon implication a eu un effet sur Pierre Nkurunziza.
Vous étiez justement en première ligne dans les protestations contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza. Mais malgré cela vous êtes toujours au Burundi.
Vous n'avez pas peur?
Je n'ai pas peur parce que tout le monde va mourir même
celui qui tue les autres.
Je n'ai pas peur parce que j'ai échappé à la mort à deux
reprises et j'ai compris que Dieu peut me protéger. Et si je meurs, ma mort ne
sera pas une surprise !
Mes amis ont été tués devant moi et je ne pouvais pas les
protéger.
Les amis de Nkurunziza ont été également tués et il n'a
pas pu les protéger alors qu'ils avaient tous les moyens.
Si moi et Pierre Nkurunziza avons perdu des amis que
personne ne voulait perdre, je n'ai pas peur.
Je reste optimiste que la
solution viendra bientôt.
Vous vous souvenez encore
d’amis que vous n’avez pas pu sauver il y a quatre ans.
Qu'est-ce qui vous a,
le plus, choqué?
Lors des manifestations contre le troisième mandat, j'ai été
choqué en voyant des policiers tirer dans les maisons où il y avait des femmes
et des enfants qui ne participaient même pas aux manifestations.
J'ai été particulièrement choqué par la mort
de Théogène Niyondiko, un étudiant qui était manifestant à Musaga. Quelques
jours avant son assassinat, il avait accordé une interview à Aljazeera.
Théogène
était moralisateur. Qu'il repose en paix!
J'ai été particulièrement choqué par la mort de Kabura
Timothée, un militaire qui a été tué devant moi à la 9ème avenue à
Nyakabiga devant l’hôtel Niwakal. C’était au mois de mai, je me dirigeais vers
le campus Mutanga dans l’avant-midi. Tout à coup, moi et mes amis entendîmes
des coups de feu derrière nous. Un policier qui était sur un pick-up venait de
tirer sur Timothée.
Quand je me suis retourné, j’ai vu Timothée tomber dans un
caniveau. Nous venions juste de passer devant ce militaire et un étudiant qui s’appelle
Vianney venait de discuter avec lui de passage.
Lorsque nous l’avons vu tomber, nous avons fait demi-tour
et nous avons constaté qu’il était déjà mort.
Je ne pouvais pas imaginer qu'un militaire pouvait être
tué par un policier. Ce jour-là, j'ai constaté que les forces de sécurité ne
sont pas unies et c'est dangereux même aujourd’hui ou demain si un tel incident
se reproduit.
Tantôt vous parliez de la
solution, d’où viendra-t-elle selon vous?
La solution viendra des burundais et des partenaires du
Burundi car le processus de paix implique différents acteurs.
Les burundais feront le premier pas et les autres
partenaires s’appuieront sur l’environnement qui aura été créé par nous-mêmes.
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