jeudi 12 août 2021

LONA : Le duo Christian-Kefa au cœur des magouilles financières ?

 

Ils sont suspectés d’avoir illégalement amassé des millions de francs burundais à travers l’agrément des sociétés de jeux de hasard ces deux dernières années selon nos sources. Aujourd’hui, Christian Nkurunziza et Kefa Nibizi, respectivement directeur général et directeur commercial de la Loterie Nationale du Burundi, ne savent pas ce qui les attend au bout des enquêtes commanditées par la présidence de la République.

L’ordre serait venu directement du président de la République selon nos sources. Après avoir ordonné la suspension temporaire de toutes les maisons des jeux de hasard le 16 juin dernier, nos sources signalent qu’Evariste Ndayishimiye aurait ensuite ordonné la mise en place d’une commission ad hoc dirigée par le chef du Service National de Renseignement, le général Ildephonse Habarurema, pour enquêter sur les actes de corruption et de détournements de fonds dont seraient responsables les hautes autorités de la LONA Christian Nkurunziza et Kefa Nibizi à travers leur collaboration avec les sociétés qui opèrent dans ce secteur des jeux de hasard.

La plupart des sociétés préféreraient la sous-traitance

Pour avoir la licence, chaque société des jeux de hasard payait une somme non remboursable de 50 mille dollars américains sur le compte de la Loterie Nationale du Burundi à la Banque de la République du Burundi. L’autorité de régulation de ces jeux de hasard, LONA, donne ensuite la licence à la société après la présentation du bordereau de versement de la banque centrale. Mais, selon nos sources, peu de sociétés se sont acquittées de ces frais d’agrément. Nos sources indiquent qu’après l’agrément, le principal souci des sociétés agréées par la LONA était d’essayer de récupérer, à travers leurs sous-traitants respectifs, les 50 mille dollars payés lors de l’agrément. Nos sources expliquent que ces sociétés parrainées avaient l’obligation de donner des pots-de-vin aux hautes autorités de la Loterie Nationale du Burundi en plus des frais d’adhésion payés auprès de ces sociétés agréées par la LONA. Chaque nouvelle société devrait payer un montant qui pouvait aller jusqu’à 10 mille dollars américains à la société qui la parrainait. La société devrait également donner au moins 4 millions de francs burundais de pots-de-vin aux responsables de la Loterie Nationale du Burundi selon nos sources.

La période de grâce et après

Après l’agrément, chaque société des jeux de hasard avait le droit de travailler sans rien payer pendant 6 mois. C’est ce qui est défini comme une période de grâce selon nos sources. Après cette période de grâce, il était prévu un paiement mensuel de 2 millions de francs burundais pour une société agréée. Mais, des fois, ce paiement pouvait être absent pendant plusieurs mois selon nos sources. La société concernée négociait alors avec la LONA pour la couvrir en échange d’un pot-de-vin d’une somme inférieure à celle que la société devait payer en temps normal, indiquent nos sources. "Si par exemple, nous travaillons pendant 6 mois sans payer, au lieu de payer 12 millions de francs, nos chefs versaient à la BRB une somme inférieure à 4 millions et donnaient environ 2 millions aux cadres de la LONA. La LONA se chargeait ensuite de nous couvrir en expliquant, par exemple, que nous avons subi d’énormes pertes durant cette période", nous déclare une source au sein d’une société de jeux de hasard.

Christian et Kefa ne se présenteraient plus régulièrement au travail ?

Depuis le mois de juin, l’ancien gouverneur de Bururi Christian Nkurunziza et le président du parti FRODEBU Nyakuri Kefa Nibizi se présentent rarement au travail selon nos sources. Ces dernières expliquent que ces deux hauts cadres de la LONA, nommés par le président Pierre Nkurunziza en 2018, auraient peur d’être kidnappés en cours de route ou au travail comme le président de la commission d’enquête c’est le chef du Service National des Renseignements, le service dont certains agents sont redoutés pour leurs participations dans des kidnappings, des assassinats et des disparitions forcées.

Le DG de la LONA dément

"Je n’ai jamais reçu de pots-de-vin de la part des sociétés des jeux de hasard", nous répond le directeur général de la LONA qui ajoute que les sociétés de sous-traitance sont reconnues par les contrats. Selon Christian Nkurunziza, les sociétés agréées ont seulement l’obligation de les informer sur certains changements. "Nous ne nous ingérons pas dans leur organisation interne. Nous vérifions seulement s’ils n’ont pas violé les dispositions pertinentes du contrat", souligne le directeur général de la Loterie Nationale qui explique que ces changements, c’est entre autres, les cas d’adhésion des sociétés de sous-traitance, le changement de dirigeants ou d’emplacement des sociétés agréées.

Selon Christian Nkurunziza, c’est la Loterie Nationale du Burundi qui a pris la décision de suspendre les jeux sans aucune injonction de la présidence de la République. Le directeur général explique que la LONA est entrain de revoir les réglementations des jeux. "Nous recevions beaucoup de plaintes, parfois pour des règlements de jeux mal élaborés par certaines sociétés, parfois pour des conflits dans les ménages à cause des époux de moyens financiers médiocres qui allaient dépenser l’argent, qui pouvait servir à acheter quelques kilogrammes de haricot, dans ces jeux". Il faut que les jeux se déroulent en toute sérénité et que la population ne soit pas lésée, explique Christian Nkurunziza qui précise que, jusqu’à présent, au total 12 sociétés de jeux de hasard ont été agréées par la LONA et ont payé chacune les 50 mille dollars américains exigés.

Le patron de l’autorité de régulation des jeux de hasard affirme également ne pas être au courant de l’existence d’une commission chargée d’analyser la question de corruption et de détournements de fonds. "Personnellement, je ne suis pas informé sur l’existence d’une telle commission. Je crois même que c’est faux jusqu’à preuve du contraire. Même si c’était le cas, ils ont la latitude de contrôler tout le pays".

Pour l’information selon laquelle il ne va plus régulièrement au travail, Christian Nkurunziza dément au cours de notre interview. "C’est faux. Même maintenant je suis au bureau."

"Même s’ils me corrompaient, je ne leur serais pas utile."

Le directeur commercial de la LONA indique qu’il n’est pas informé sur la signature de bon nombre de cas de sous-traitance. Keffa Nibizi dit, toutefois, se souvenir que, dans le passé, il a analysé et donné un avis favorable sur la demande des sociétés qui voulaient travailler sous le nom commercial de 1xBet. "Je devrais participer dans l’analyse et donner mon avis mais certaines informations me parviennent à partir de l’extérieur. C’est l’opinion qui me met au courant sur certaines choses". Kefa Nibizi explique que, par exemple, il y a des informations du mois de février qui lui parviennent en juin ou juillet. "Par exemple, au cours de l’année en cours, il y a eu deux sous-traitances, je pense. Mais je ne suis pas informé".

Kefa Nibizi indique aussi qu’aucun organe étatique ne l’a convoqué pour enquêter sur sa personne depuis sa nomination comme directeur commercial à la LONA en mars 2018. "Mais, des fois, il y en a qui demandent des informations. Je leur fournis ce que je peux parce que, vous savez, les informations qui concernent la société sont fournies par son dirigeant’’.

Le directeur commercial signale également qu’il ne signe nulle part sur les documents financiers. "Je ne signe pas non plus pour que les dossiers soient approuvés. Donc ça ne vaut pas la peine de me donner des pots-de-vin parce que je ne peux pas les aider".

Sur la question de savoir pourquoi il ne se présenterait pas régulièrement au travail, Kefa Nibizi répond en rigolant. "J’étais dans un congé de sept jours qui a pris fin le mardi de la semaine passée. Je peux même montrer des documents qui le prouvent. Donc, j’ai repris le travail mercredi de la semaine passée". Il explique que rien ne peut l’empêcher de se présenter au travail quand le pays lui a fait confiance.

Il y a des gens qui cherchent des boucs-émissaires selon Kefa Nibizi. "Je pense que ceux qui propagent ce genre d’informations se reprochent de quelque chose sur ce qui se passe dans cette entreprise et cherchent à se dédouaner pour entacher les autres".

Pour fonctionner, la LONA se base actuellement sur le décret n°100/231 du 11 décembre 1989 portant réorganisation de la Loterie Nationale du Burundi. Le gouvernement et les responsables de cet établissement public sont tous convaincus que le décret est caduc.

A l'exception de ceux qui jouent en ligne, les parieurs devraient donc attendre la mise en place d'une nouvelle loi et de nouvelles réglementations des jeux pour pouvoir retrouver leurs jeux de hasard préférés via les sociétés comme Kings Investments, Sport for Africa, Bunga Bet, Mega Slot, Mele Bet, Hela Bet, Africa Games et d'autres. 

Des milliers d'employés de ces sociétés, eux, ne reçoivent plus de rémunération depuis leurs suspensions en juin dernier. 

Selon nos sources, les enquêteurs de la présidence sur les actes de corruption et de détournements de fonds au sein de la Loterie Nationale du Burundi ont également la mission d'identifier et de localiser tous les shops sur tout le territoire national. Le gouvernement aurait l'intention de retirer ces jeux de hasard des quartiers populaires.

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