Il est parmi les militants du Mouvement pour la Solidarité
et la Démocratie (MSD) qui ont extrêmement souffert en détention à Bujumbura.
Blessé par balles lors de l’attaque de la permanence nationale de son parti par
les forces de sécurité le 8 mars 2014, Roger Muhizi a été arrêté le lendemain
pour ensuite passer des années "sans permission" de se faire
soigner. Selon le Comité des Nations Unies Contre la Torture, le gouvernement
du Burundi a violé plusieurs dispositions de la Convention contre
la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
(Le Mandat)
L’administration des coups de crosses de fusils et de matraques à Roger Muhizi déjà blessé par balles, le refus aux soins de santé pendant plusieurs heures, les insultes, les intimidations, ainsi que le refus d’octroi du dossier médical font partie des éléments constitutifs de torture au sens de l’article 1 de la Convention selon le Comité Contre la Torture qui ajoute que ces coups lui infligés par des agents étatiques ont occasionné, chez la victime, des douleurs et souffrances aiguës, y compris des souffrances morales et psychologiques.
"Article 1:
1. Aux fins de la présente Convention, le terme "torture" désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu'elle soit, lorsqu'une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. Ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles.2. Cet article est sans préjudice de tout instrument international ou de toute loi nationale qui contient ou peut contenir des dispositions de portée plus large."
Le Comité Contre la Torture indique aussi que l’Etat partie n’a pris aucune mesure pour protéger la victime et sanctionner ces actes de torture malgré les plaintes. Dans sa décision publiée le 21 décembre, le Comité conclut à une violation de l’alinéa 1 de l'article 2 de la Convention.
"Article 2:
1. Tout Etat partie prend des mesures législatives, administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture soient commis dans tout territoire sous sa juridiction.2. Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture.
3. L'ordre d'un supérieur ou d'une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture."
En plus de sa détention dans des conditions déplorables dans un état de santé critique, ce militant du MSD Roger Muhizi n’a eu droit à un avocat qu’un mois et demi après sa détention dans la prison centrale de Mpimba. Le Comité confirme la violation de l’article 11 de la Convention.
"Article 11:
Tout Etat partie exerce une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d'interrogatoire et sur les dispositions concernant la garde et le traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées de quelque façon que ce soit sur tout territoire sous sa juridiction, en vue d'éviter tout cas de torture."
Les articles 12, 13, 14, et 16 de la Convention ont également été violés par les autorités burundaises selon le Comité Contre la Torture.
"Article 12:
Tout Etat partie veille à ce que les autorités compétentes procèdent immédiatement à une enquête impartiale chaque fois qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un acte de torture a été commis sur tout territoire sous sa juridiction."
"Article 13:
Tout Etat partie assure à toute personne qui prétend avoir été soumise à la torture sur tout territoire sous sa juridiction le droit de porter plainte devant les autorités compétentes dudit Etat qui procéderont immédiatement et impartialement à l'examen de sa cause. Des mesures seront prises pour assurer la protection du plaignant et des témoins contre tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison de la plainte déposée ou de toute déposition faite."
"Article 14:
1. Tout Etat partie garantit, dans son système juridique, à la victime d'un acte de torture, le droit d'obtenir réparation et d'être indemnisée équitablement et de manière adéquate, y compris les moyens nécessaires à sa réadaptation la plus complète possible. En cas de mort de la victime résultant d'un acte de torture, les ayants cause de celle-ci ont doit à indemnisation.2. Le présent article n'exclut aucun droit à indemnisation qu'aurait la victime ou toute autre personne en vertu des lois nationales."
"Article 16:
1. Tout Etat partie s'engage à interdire dans tout territoire sous sa juridiction d'autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ne sont pas des actes de torture telle qu'elle est définie à l'article premier lorsque de tels actes sont commis par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel, ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. En particulier, les obligations énoncées aux articles 10, 11, 12 et 13 sont applicables moyennant le remplacement de la mention de la torture par la mention d'autres formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.2. Les dispositions de la présente Convention sont sans préjudice des dispositions de tout autre instrument international ou de la loi nationale qui interdisent les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou qui ont trait à l'extradition ou à l'expulsion."
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Le Comité a invité le Burundi à soumettre ses observations sur la plainte de R.M à plusieurs reprises en 2017, 2019 et 2020 mais l'Etat partie n'a donné aucune suite à ces demandes d'information. Le Comité a alors constaté que le Burundi a également violé l’article 22 de la Convention à cause de ce manque de coopération. Le cas de R.M. est le dernier des 14 plaintes pour torture contre le Burundi qui ont été examinées par le Comité depuis 2014. Et selon le Comité, le Burundi avait violé ses obligations envers la Convention dans tous ces cas.
"Il s'agit
d'une grave violation des obligations de l'Etat. Mais surtout, cela prive les
victimes de torture de la possibilité d'obtenir réparation", a déclaré le Président du Comité Claude Heller à propos de ce cas de torture du partisan du MSD représenté par l'organisation Track Impunity Always (TRIAL).
Selon la décision, le Burundi a 90 jours pour informer le Comité contre la Torture de l'ONU des mesures qu’il aura prises pour donner suite aux observations de la décision en question.
Mais, en principe, cette décision du Comité contre la Torture de l'ONU n'a pas force obligatoire.
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